Demain est une autre Lune

Reinhard Furrer

Physicien né le 25 Novembre 1940 à Worgl en Autriche, il fut directeur d’un Institut de recherche sur l’environnement à Berlin.

Astronaute, il fut membre d’une mission sur la navette ‘’Challenger’’ du 30 octobre au 6 novembre 1985.

Il a publié en Allemagne un livre avec le peintre et graveur Brigitte Eckel, qui évoque cette aventure : Morgen wird der Mond andres sein.

Il est mort le 8 septembre 1995 dans un accident d’avion.

 

Demain est une autre Lune

 

La Terre apparaît

A la fenêtre

Avec ses déserts

 

qu’il n’y ait pas d’eau

là-bas

ne compte pas, ici

l’eau n’importe

que pour le reflet du Soleil

 

la Terre est si ronde

je ne peux m’y accrocher

 

le jour

la nuit est une ligne

qui longe l’Univers

le jour

la nuit se fait noire, bleue et rouge

le jour et la nuit deviennent des instants

 

à gauche

je vois le jour

à droite, la nuit

c’est la nuit

quand s’estompe le bleu

un jour terrestre dure un clin d’œil.

 

Les aurores boréales, australes

sont du temps de la nuit

et pendant la nuit tombent des rideaux de lumière

auxquels s’accroche la Terre obscure

 

soudain

chute sur la Terre de la clarté

et un cercle se forme

et du lieu où il touche la planète

naît un reflet bleu

la Terre, alors

s’ourle d’une bordure éclatante

et un jour se lève

quand elle pénètre dans l’obscurité de l’Univers

 

je ne vois pas d’étoiles qui n’étincellent

elles sont calmes, ici

dehors

il n’y a rien entre moi et leur lumière

pas d’atmosphère qui les fasse vaciller

mon ciel est tacheté de ses lueurs tranquilles

ses constellations montent et s’éloignent

l’Univers brille de ses étoiles

et la Terre scintille, dans mon dos

aujourd’hui

on m’a demandé si je pensais aux choses de la Terre

mais je suis, ici, en haut

beaucoup trop seul

et c’est à nouveau le jour

la nouvelle Terre se lève

si j’étais chez moi, ici,

en haut

je descendrais avec joie

vers elle.

 

La navette est sur le chemin

du retour

nous voulons descendre vers la Terre avec ses nuages

et ses mers

encore une fois, une dernière fois

nous tournons autour d’elle

Baja Californie, une côte et un pays

les terriens sont là-bas

et nous attendent

 

il y aura des yeux, là-bas

en bas

vers qui je peux m’avancer

d’ici, déjà, je les vois

des yeux

pour l’amour desquels je ne peux pas rester

dehors.

Reinhard Furrer

                                                                                             Traduction : Régine Rioult

                                                                                             Adaptation : Yvon Le Men

 

 

 

 

 

 

 

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