La vie est belle ici
pour la petite fille assise sur le sable
d’une place tranquille ;
tandis qu’une voix grave énumère les noms
de tous les jeunes gens
qui sont morts à la guerre,
l’année de leurs vingt ans.
La vie est belle ici…
Et si l’on commémore
ce jour lointain de mai où la paix fut signée,
c’est pour que les enfants de demain se souviennent
de ceux qui sont tombés au nom des libertés.
La vie est belle ici
loin des hauts barbelés et du fracas des bombes,
loin des sabres sanglants et des corps mutilés,
loin de tous les prêcheurs qui attisent les haines,
loin des avions vengeurs et du bruit des sirènes
qui chassent de chez eux des peuples sacrifiés.
La vie est belle ici
dans la douceur dorée d’un matin de printemps
où drapeaux et fanfare
témoignent de l’Histoire.
Soudain, la petite fille
s’aperçoit qu’elle est seule et, brusquement, s’inquiète…
Pourquoi tous ces messieurs qui lui tournent le dos,
alignés sur leurs chaises
sortent-ils leurs mouchoirs lorsque les écoliers
chantent la Marseillaise ?
Alors, elle aussi pleure…Elle appelle sa mère
qui s’était éloignée, insouciante et légère,
pour voir le défilé.
Elle accourt et rassure
l’enfant qu’elle console.
Et tout rentre dans l’ordre.
La vie est belle ici, à l’abri des dangers.
Mais la faim et la peur, l’humiliation, les larmes
pourraient bien revenir, si nous n’y prenons garde.
Yvonne Le Meur-Rollet, octobre 2024