Yvonne Le Meur-Rollet, poème inédit – 2015
(Le narrateur est un jeune Gabonais qui rêve d’un « ailleurs » et tente de fuir vers un monde meilleur)
Sur L’Ogooué
Ma longue barque avance entre les rives sombres…
Des fumées blanches montent
Au-dessus d’un village où des tam-tams annoncent
Que des éléphants rôdent
Et qu’il faut se hâter de rentrer la récolte.
La nouvelle s’élance, écorche le silence,
Ricoche jusqu’à l’anse où dorment les pirogues.
C’est un matin de miel et ma coque se glisse,
Chargée de mes espoirs, sur la soie verte et lisse
Que ma perche cisaille en descendant le fleuve.
D’heure en heure, je fuis la touffeur des réserves
Où mon enfance noire a distillé ses peurs :
Les hideux caïmans et les hippopotames,
Les voix des forestiers, les lourds camions de grumes
Déversant aux pontons des géants mutilés
Que le fleuve reçoit , éclaboussé d’écume…
Dans la clairière proche, une antilope inquiète
Vient boire au marigot où des braconniers guettent
Tandis que je m’enfuis vers un monde meilleur,
Loin des perroquets gris et des singes railleurs.
Le jour arrive enfin et les rives s’écartent…
Des radeaux d’okoumés, échoués sur le sable,
Attendent les secours de bruyants remorqueurs
Pour atteindre le port que le soleil embrase.
Les nuages, là-haut, brillent dans le ciel vert.
Le delta, étendu, comme un arbre sans feuilles,
Me conduit vers le large… Et l’Océan m’accueille
Pour m’emporter là-bas, où me poussent mes rêves…
Yvonne Le Meur-Rollet
Merci Claire d’avoir retrouvé cette photo prise sur une des rives de l’Ogooué, à Lambaréné en 1967.
Le poème « Sur L’Ogooué » que j’ai écrit en 2015, s’est nourri des souvenirs de ce lointain séjour au Gabon.
votre poème et très beau, avoir votre nom, vous l’auteur, serait un plus.