choisir une photographie, l’observer avec soin et produire un texte bref pour exprimer un ressenti en utilisant un vocabulaire de l’émotion.
Une lecture collective des textes sera faite.
choisir une photographie, l’observer avec soin et produire un texte bref pour exprimer un ressenti en utilisant un vocabulaire de l’émotion.
Une lecture collective des textes sera faite.
Au sujet d’une photo que j’ai prise à l’automne dernier : photo d’une feuille tombée.
Osez, osez poésies
Une feuille tombée d’un chêne centenaire
S’est installée chez moi, glissée sous mon soulier.
Quand je l’ai aperçue au sol de ma chaumière
Jaunie et desséchée, l’envie de la broyer
D’une main vengeresse m’a traversé l’esprit.
J’ai coupé mon élan avant d’être brutal
J’ai compris que j’allais pour le plaisir d’un bruit
Faire du froissement un dommage fatal.
Je me suis retenu, confondu en pardon
Avec pour repentir de la laisser entière
Nue sans décoration et être encor un peu.
Une feuille est venue trôner dans mon salon.
Un arbre de noël sans boule et sans lumière
Un espoir de vieillesse un pari sans enjeu.
Le poème qui suit est inspiré par une photographie représentant une mer de nuages recouvrant une vallée dans un paysage montagneux. A cette photographie se superpose, dans la mémoire de l’auteur, l’image d’un célèbre tableau de Caspar-David Friedrich (peintre romantique allemand du XIXème siècle) intitulé « Le voyageur contemplant une mer de nuages ». Le narrateur du poème est ce voyageur.
Le retour du marcheur solitaire
Des jours durant, j’avais marché près des rivières,
Gravi d’étroits sentiers, le bâton à la main,
Visité des donjons sur des collines fières
Pour enfin revenir au début du chemin.
Je parvins un matin sur le haut promontoire
D’où j’avais si souvent découvert au lointain
Dans son tranquille écrin, ce lieu chargé d’Histoire,
Mon village natal au pied d’un vieux fortin.
Mais à mes pieds roulait une mer de nuages
Qui laissait voir des rocs sombres et menaçants
Enveloppés de gris, creusés de dents sauvages,
Récifs déchiquetés par des flots frémissants.
Et je crus un instant avoir changé de monde
Ne voyant devant moi qu’un abyssal ravin
Où s’affrontaient sans cesse, en un sabbat immonde,
Des images d’effroi que je chassais en vain.
J’avais peur, je tremblais, mes mains étaient glacées,
Je me sentais fragile et près de défaillir…
Mais soudain dans le ciel, en précises percées,
Les flèches du soleil se mirent à jaillir.
La brume devant moi bientôt devint fumée,
Commençant à rosir, légère, et s’élevant ;
La montagne reprit, au loin, sa forme aimée,
Et les nuages bas s’envolèrent au vent.
Lorsque l’épaisse brume enfin s’en fut allée,
Défaite par l’ardeur des rayons du printemps,
Je pus apercevoir ma riante vallée
Et de longs reflets bleus aux miroirs des étangs.
Yvonne Le Meur-Rollet- juin 2022
Les deux poèmes qui suivent ont été inspirés par deux photos de Jean Pierre BILLOIS postées sur Facebook.
La premiére photo représentait l’effritement des dunes aux Sables d’or et la deuxième un entassement de coquillages en bord de mer à Saint Cast Le Guildo.
Dunes fragiles
Nos vies s’effritent lentement
telles les dunes sous le vent
quoiqu’on fasse le sable passe
évanoui sans laisser trace
Tant de gens pleurent silencieux
un passé que rien ne ramène
une vie aux grains si soyeux
que seule la mémoire engrène
Aucun cordon aucun système
ne fortifie la dune humaine
tressée de chair et de sang
pailles dispersées par le vent
Michèle Pettazzoni 11/05/2021
Coquilles vides
J’ai ramassé des coquillages
serrés les uns contre les autres
vides de vie et de courage
balancés d’une vague à l’autre
La mer, ce curieux sarcophage
entrouvert sur nos souvenirs,
souffle aux enfants cet avantage
de collectionner dans les rires
Sommes-nous des coquilles pleines
de mémoire qui nous façonne ?
Puis nous perdons formes humaines
et l’océan nous abandonne …
Michèle Pettazzoni 31/05/2021
Jour d’avant, Jour d’après… l’image, la photo sont souvent là pour fixer un moment, pour faire vibrer notre imaginaire, pour dire l’instant qui passe… Quoi de mieux de s’être retrouvés dans ce vieux moulin de St Jacut datant de 1415 autour d’un bon verre, d’un hémicycle pour échanger nos textes, nos impressions : une photo de famille, un moment intime, un visage, une photo en avant-propos d’une lettre adressée par François Mitterrand à Anne Pingeot, des photos de rivage, de coquilles vides, d’isthme d’eau claire prises par Jean-Pierre, un paysage de Polynésie et une vague qui déferle … avec le talent, les correspondances musicales d’Olivier Guérin à la guitare pour vous remercier de ce moment de convivialité.
LA VAGUE
Eployée de vents
et de sable
d’où la turbulence
s’installe
Brûlure de l’instant
et du pressentiment
La vague
invite à l’espace
Tornade, bourrasque
emportent
les certitudes lointaines
ramènent sur la plage
écumes et charrois de sable
Qui ne saurait
entendre l’inconnu en soi
Qui ne saurait
sonder l’incommensurable ?
Qui ne saurait tisonner
l’incandescence du réel ?
Car si toute mesure
est à l’aune du savoir
Comment mesurer
le ciel et la mer qui s’effacent ?
Comment mesurer les ténèbres
qui s’installent
Comment mesurer
l’écume éparse ?
Une brèche se forge dans le réel
l’attente se noue dans l’intervalle
Mais qui dira l’éclat de la voix
où le vent, le feu, la vague
s’invitent tout à la fois ?
Anne Bihoreau, St Malo
Le texte ci-dessous peut être illustré par une photo représentant le paysage « paradisiaque » d’une île haute où les cocotiers bordent un lagon, au milieu du Pacifique.
Le narrateur est un Tahitien vivant dans l’une de ces îles qui font tant rêver
Ici.
Mon pays, c’est ici
Et tous ceux qui en rêvent
Imaginent souvent
Que c’est le paradis.
Je suis né dans cette île
Posée comme une perle
Sur un large lit bleu tout festonné d’écume.
La turquoise et la nacre
L’émeraude et l’azur
Eclaboussent le vent qui chante la vanille.
Les cocotiers se bercent
Et les filaos dansent
Au murmure des pas sur la route de sable
Crissante de corail.
Parfois un voilier blanc
Quatre-mâts insolent
Pénètre dans la baie
Chassé par l’Océan.
A son bord, des touristes
Venus du Missouri, de Tokyo, de Paris
Plongent leurs yeux ravis
Dans les eaux d’améthyste.
Ils passent, s’émerveillent…
Le tiède vent doré,
Dans leurs vieux corps réveille
Des frissons oubliés.
Mais quand les voiles fuient, gonflées de dollars fiers
Les hauts manguiers frémissent
Des désaccords amers
De ma guitare grêle.
L’île alors sent la bière et le coprah ranci.
Mon pays, c’est ici
Et tous ceux qui en rêvent
Ne peuvent deviner
Que je m’y meurs d’ennui.
Yvonne Le Meur-Rollet