C’est la rentrée ! Venez offrir en partage vos poèmes et les poèmes des auteurs que vous aimez sur le thème de « l’enfance ».
« L’enfance » sera le thème de l’apéro-poétique du vendredi 29 septembre -18h30 – à « La Goélette », 31 Grande Rue
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Ailleurs dans le passé
Ailleurs c’était mon enfance,
la chaleur des moissons,
les chariots chargés de gerbes de blé,
les sauts avec mes frères dans la bale de blé,
c’était l’insouciance de l’enfance.
Je me souviens de ma petite robe rouge
qui flottait au vent quand je courrais,
elle était si douce en suçant mon pouce.
A la ferme, il y avait le taureau
dont on m’avait dit qu’il avait peur du rouge.
Je me souviens de mon effroi,
je courais alors chez les chevaux qui tapaient du pied,
puis a l’autre bout c’était les moutons et leur berger.
Quand on sortait la belle voiture,
on montait tous a l’arrière,
mon grand-père conduisait
et ma grand mère tricotait avec une couverture sur les genoux.
ce ne sont que des souvenirs merveilleux
d’amour et de chaleur.
C’était il y a longtemps
ailleurs dans les terres de somme
ailleurs dans le temps,
un temps disparu
mais qui m’entraîne ailleurs.
Dessine-moi l’enfance
Et toujours la même maison
les volets bleus le regard clair
les chambres roses de chansons
ricochant dessus les gouttières
Le toit d’un rouge déraison
les portes vives de mystère
murmure d’eau et soleil rond
rayonnant sur la terre entière
Et du vert, du vert à foison
des fleurs des arbres quelques pierres …
Et au creux du cœur un layon
un chemin droit vers la lumière.
Michèle Pettazzoni
L’enfance
« J’suis trop p’tit pour me prendre au sérieux
Trop sérieux pour faire le jeu des grands,
Assez grand pour affronter la vie
Trop petit pour être malheureux »
Et pourtant…
Nul besoin d’une chanson
Pour se rendre compte que l’enfance
Est bien souvent vécue dans la souffrance
Au travers des générations
Enfance volée, enfance violée
Enfance niée, enfance déniée
Enfance maltraitée.
Le monde contemporain n’en finit pas
Avec les millénaires d’exploitation d’enfants soldats,
trop jeunes au travail, rejetés par des familles désorientées
On le consacre enfant-roi ? Pour être meilleur consommateur.
On n’entend pas ses pleurs.
Le petit d’homme, incapable d’autonomie
A contrario de ses congénères animaux
Paye à l’infini son accompagnement vers la vie.
Un sage d’Afrique nous enseigne :
« On n’hérite pas de la terre de ses ancêtres
Mais on l’emprunte à ses enfants »
Serait-ce cette dette qui rend les adultes si brutaux
Envers leurs petits égaux ?
L’historien a toujours raison
qui raconte la déraison
des adultes contre les jeunes.
Face à notre génération
Je déclare envers Aragon
L’Enfance est l’avenir de l’Homme.
Merci à J. Higelin et L. Aragon pour leur contribution posthume à l’élaboration de l’introduction et conclusion de ce texte.
Catherine
Merci de l’accueil convivial reçu lors de cet apéro-poétique sur l’enfance.
Je vous transmets le poème écrit et lu à cette occasion. Au plaisir d’une prochaine !
L’enfant
est monté sur la chaise
Une chaise empaillée
inconfortable, bancale
Sa jupe dépasse le rebord de la table
Les torses des adultes comprimés par l’attente
retiennent leur souffle
Les coupes de fruits luisent
des relents de sucre dont certains se pourlèchent
et, l’enfant se lance
il chante
il ne sait de quels mots
sera faite la suite des phrases
il ne sait comment retrouver la strophe finale
il sait que l’auditoire est là
intraitable, envieux et gourmand tout à la fois
et, il chante
Heureux de l’espace qu’il emplit de sa voix
Heureux de voir scintiller
les perles autour de ce cou si pâle
Heureux d’exercer ses ailes
au-dessus de telles têtes
Heureux de sentir l’air frais par la fenêtre
au-dessus de telles têtes
Heureux de sentir l’air frais par la fenêtre
Heureux de voir la larme qui perle à l’oeil de sa mère
La chaise geint
le plancher grince
la pendule s’arrête
Une seule chose l’intéresse
Cette ritournelle
qui lui trotte dans la tête !
BRIBES D’ENFANCE
Au réveil, la tarte au flan chaud servie à domicile par le boulanger
Les effluves, le bon goût de lait et de vanille
Une sensation puissante de liberté lors de ballades solitaires sans dire où je vais
A vélo ou juchée sur mes patins à roulettes, je roule vite, confiante
Sur le chemin de l’école, des bouquets de chèvrefeuille dont je suce les fleurs avec délice
Au fond de l’allée ombragée, la cour de l’école avec son gravier ; mes genoux en gardent un cuisant souvenir
La découverte joyeuse de la lecture, toutes les collections rose, verte, rouge et or soigneusement rangées dans la bibliothèque de ma chambre
Le chagrin de leur disparition brutale, vécue comme une tragédie, première trahison maternelle
Les visites quotidiennes à la voisine âgée vêtue de noir qui pleure son mari et son unique fils
Le plaisir de goûter son riz au lait et son chocolat chaud dans un grand bol émaillé
Des parfums inconnus – fleur d’oranger, naphtaline, Synthol – flottent en suspension dans toute la maison
Se sentir tiraillée entre rester pour faire plaisir et ne pas s’attarder dans le froid glacé du chagrin
Revenir en courant vers la lumière, le bruit et la chaleur de l’antre familial
Dès quatre ans, les séjours en colonies de vacances l’été pendant un mois
Les siestes imposées dans d’immenses dortoirs d’où fusent les rires et les chuuuut
La toilette au robinet et à l’eau glacée réduite au minimum faute d’intimité,
Les regards furtifs, biaisés, insistants des garçons
Les parties d’osselets, de billes à même le sol, les déguisements d’indiens, les têtes coupées de nos poupées en guise de trophée
Les plaisirs simples en famille comme la traversée en bac, toute une expédition pour des pique niques à l’ile de Ré
Les puces de mer entre mes doigts, la couleur verte des volets, la beauté des roses trémières
Dormir est toujours un supplice, je veux me coucher très tard, me réveiller très tôt, jouir de la vie
De cette partie de mon enfance remonte une sensation irrésistible de liberté, d’un possible à l’infini
Françoise Sartorio
RETOUR EN ENFANCE
Ma fille, ma mère
J’ai besoin de toi
De ta force pour tenir debout
De tes mains pour masser ma peau fatiguée
comme je le faisais sur ton petit corps
Mes mains étaient énergiques sur ton être vigoureux
Tes mains sont délicates
Les ridules bleutées et les nœuds t’impressionnent
Tu me laves et détournes le regard
Tu choisis mes vêtements
Tu me donnes à manger, à boire
Tu m’expliques patiemment les mots perdus
Le timbre de ta voix évoque une douceur maternelle
perdue dans ma mémoire
Parfois tu répètes, t’impatientes
Je sens alors ta lassitude, ton empressement à en finir
Comme un petit enfant, mes larmes montent
Je saisis ta main, je m’accroche à ta vie
Je te supplie, encore, encore
Tu es mon enfant, ma chair
Je t’ai donné la vie
Aide moi à retenir la mienne
Tu es ma mère qui me manque tant
Je voudrais me blottir dans tes bras
Me lover comme un nourrisson
M’endormir doucement, au creux de ta chaleur
Au rythme de tes bercements et de tes comptines
Et ne plus me réveiller
Françoise Sartorio
SOUVENIRS D’ENFANTS (FAUX PANTHOUM)
Les images reviennent
Sur mes souvenirs d’enfant,
Ma mémoire incertaine
Plane et survole l’estran,
Sur mes souvenirs d’enfant
Les vagues me ramènent
Planent et survolent l’estran.
Les journées s’égrennent,
Les vagues s’enchainent
Noyant mes plaisirs d’antan .
Mes courtes journées s’égrennent
Telles les coquilles d’argent
Noyant mes plaisirs d’antan
Echouées sur mon domaine
Telles les coquilles d’argent
Les blanches porcelaines
Echouées sur mon domaine……
C’est l’aube de mes dix ans
Les blanches porcelaines
Les mouettes ricanant.
Cest l’aube de mes dix ans
Les rochers par douzaines
Les mouettes ricanant
Des images reviennent.
Les rochers par douzaines
Le sable omniprésent
Des images reviennent
Sur mes souvenirs d’enfants …….
louise Montagne -septembre2023
désolée pour le H de pantoum,j’ai oublié de corriger
Merci et bravo, Louisette pour ce joli poème qui a la forme d’un « vrai » pantoum,sans pour autant respecter toutes les règles de la poésie classique « à forme fixe ».
L’essentiel en poésie n’est pas d’obéir à des règles rigides, mais de toucher le lecteur ou l’auditeur par la richesse des idées et des images. A cela s’ajoutent le choix des mots leur musique ainsi que le rythme du texte .Tous ces éléments contribuent à créer de l’émotion et permettent au poète de faire partager sa sensibilité et sa vision du monde.
Et, comme à chaque fois, tu y es parvenue.
BRIBES D’ENFANCE
Au réveil, la tarte au flan chaud servie à domicile par le boulanger
Les effluves, le bon goût de lait et de vanille
Une sensation puissante de liberté lors de ballades solitaires sans dire où je vais
A vélo ou juchée sur mes patins à roulettes, je roule vite, confiante
Sur le chemin de l’école, des bouquets de chèvrefeuille dont je suce les fleurs avec délice
Au fond de l’allée ombragée, la cour de l’école avec son gravier ; mes genoux en gardent un cuisant souvenir
La découverte joyeuse de la lecture, toutes les collections rose, verte, rouge et or soigneusement rangées dans la bibliothèque de ma chambre
Le chagrin de leur disparition brutale, vécue comme une tragédie, première trahison maternelle
Les visites quotidiennes à la voisine âgée vêtue de noir qui pleure son mari et son unique fils
Le plaisir de goûter son riz au lait et son chocolat chaud dans un grand bol émaillé
Des parfums inconnus – fleur d’oranger, naphtaline, Synthol – flottent en suspension dans toute la maison
Se sentir tiraillée entre rester pour faire plaisir et ne pas s’attarder dans le froid glacé du chagrin
Revenir en courant vers la lumière, le bruit et la chaleur de l’antre familial
Dès quatre ans, les séjours en colonies de vacances l’été pendant un mois
Les siestes imposées dans d’immenses dortoirs d’où fusent les rires et les chuuuut
La toilette au robinet et à l’eau glacée réduite au minimum faute d’intimité,
Les regards furtifs, biaisés, insistants des garçons
Les parties d’osselets, de billes à même le sol, les déguisements d’indiens, les têtes coupées de nos poupées en guise de trophée
Les plaisirs simples en famille comme la traversée en bac, toute une expédition pour des pique niques à l’ile de Ré
Les puces de mer entre mes doigts, la couleur verte des volets, la beauté des roses trémières
Dormir est toujours un supplice, je veux me coucher très tard, me réveiller très tôt, jouir de la vie
De cette partie de mon enfance remonte une sensation irrésistible de liberté, d’un possible à l’infini
Françoise Sartorio
RETOUR EN ENFANCE
Ma fille, ma mère
J’ai besoin de toi
De ta force pour tenir debout
De tes mains pour masser ma peau fatiguée
comme je le faisais sur ton petit corps
Mes mains étaient énergiques sur ton être vigoureux
Tes mains sont délicates
Les ridules bleutées et les nœuds t’impressionnent
Tu me laves et détournes le regard
Tu choisis mes vêtements
Tu me donnes à manger, à boire
Tu m’expliques patiemment les mots perdus
Le timbre de ta voix évoque une douceur maternelle
perdue dans ma mémoire
Parfois tu répètes, t’impatientes
Je sens alors ta lassitude, ton empressement à en finir
Comme un petit enfant, mes larmes montent
Je saisis ta main, je m’accroche à ta vie
Je te supplie, encore, encore
Tu es mon enfant, ma chair
Je t’ai donné la vie
Aide moi à retenir la mienne
Tu es ma mère qui me manque tant
Je voudrais me blottir dans tes bras
Me lover comme un nourrisson
M’endormir doucement, au creux de ta chaleur
Au rythme de tes bercements et de tes comptines
Et ne plus me réveiller
Françoise Sartorio
Parfums d’enfance
De plus en plus souvent, les pas de ma mémoire
Mènent à cette cour, à l’ombre du tilleul,
Où le pelage roux d’un très vieil épagneul
Glisse vers le ruisseau que le clair soleil moire.
Ma mère sur le seuil, brandissant l’écumoire,
Hampe de mousse rose aux reflets de glaïeul,
M’appelait d’un signal entendu de moi seul :
« S’il te plaît, viens m’aider !… Je range mon armoire ».
Les pots de prunes d’or, les coulis de cassis,
Sagement s’alignaient, dans un ordre précis,
Prometteurs de desserts et de goûters de prince.
Les bonheurs d’autrefois exhalent leurs odeurs :
Prisonniers du placard dont l’ample porte grince,
Ils chuchotent des mots parfumés de pudeurs.
Yvonne Le Meur-Rollet
dans le recueil « Sur les sentiers de la mélancolie »-2019
Odeurs
Les odeurs toujours là
Des oignons cuits au four
Que nous sentions déjà
En sortant de la cour
Dans les rues buissonnières
De nos premiers amours
Sont des anniversaires.
Les pommes certains jours
Remplaçaient les oignons
Et parfois à leurs tours
Les lapins sentaient bons.
Souvent le vendredi
Était jour des galettes
Veille du samedi
Où l’agape s’arrête
On signait de la croix
Le pain à partager
Et l’on était sans voix
Au moment de manger.
Nos enfances passées
Dans les odeurs du four
Et dans les mijotées
Ont les goûts de l’amour.
Voici un de mes tout premiers textes, écrit en 1972.
J’aborde l’adolescence, content, mais déjà conscient que je resterai nostalgique des rêves et de la féerie de ma première jeunesse.
Papa rire
Le démaquillage
Est terminé.
Il est grand temps
De s’en aller
Et les enfants
Ne riront plus
Aux éclats
Autour de toi,
Même s’ils sont sages.
Tes gestes maladroits,
Ton grand nez
Peinturluré,
Ton chapeau tout tordu
Ne reparaîtront plus
Que dans nos souvenirs.
Ils nous feront sourire
On se pliera de rire
On sautera de joie
Et on se souviendra
De ton harmonica
Des énormes savates,
Et du bruit de tes pas
Claquants sur la piste.
Et ton sourire triste
Sur le nœud de cravate
Va nous manquer autant
Que tes frasques et tes chants.
Quitter l’enfance
J’ai quitté mon enfance
comme on quitte un pays,
une terre intranquille
aux promesses trahies
J’ai quitté une enfance
à l’appel de la vie,
m’évadant de sa ganse
qui asphyxiait mes nuits
J’ai franchi la frontière
étouffant les hauts cris
des bouches familières
m’accaparant au nid
Jeunesse ténébrante
où je mourais d’ennui,
où ma grande impuissance
bâillonnait toute envie
Je rêvais d’herbe tendre
de forêt, de répit…
Et dans un cœur qui tremble
souvent la mort sourit
J’ai renié mon enfance
son insouciance enfuie,
laissant une brillance
sur les gouttes de pluie
Je la regarde en face
la frôlant dans ses bruits,
ne tenant pas en place
telle l’enfant qui fuit. Michèle Pettazzoni
le 24 septembre 2023