Poèmes offerts sur le thème « Archipels », Festival La Houle des mots 2022. Poètes des îles – Voir en commentaires…
Ce contenu a été publié dans 5 ème Festival, A la Une, La houle des mots, Mots en cadeau. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.
Archipel
Oasis au goût de miel,
Aux couleurs d’Arc en Ciel.
Joyaux préservés,
Jardins secrets,
Où se réfugier…Archipel.
Îles d’Amours,d’aventure et de désir.
Îles de courage, de valeurs et de plaisir.
Archipels,
Îles,
Eau,
Horizon,
Évasion.
Archipels,
Perdus,égarés, suspendus,
Suspendus…
Comme si le temps n’existait plus.
Juste le présent à perte de vue,
Rythmé par les vents et lumières,
Bercé par le ressac des coquillages,
Qui lorsqu’ils s’entrechoquent…sonnent
Et font chanter la mer…
Divinement bien….(aux ebihens)
Ferme les yeux,
Écoute…
Sur l’Archipel, tu es aux premières loges.
Écoute,
Écoute l’infini,
À en perdre l’horizon.
Ça bouillonne, ça frissonne,
Ça résonne….
Écoute chaque note,
Aucune fausse note.
Chut…
Écoute,
Tu es le silence dans la partition
Chut…
Sur ton rocher, sur ton île
Tend l’oreille,
Tu es au coeur d’une symphonie,
Qui joue des merveilles…
Fais gaffe, elle peut te réveiller,
Toi qui sommeille…
Et faire battre ton coeur en Archipel.
Pervenche
Presqu’île
Nous voici près de l’archipel
Presque tranquille,
Sur la presqu’île,
Presque entourés d’eau et de sel.
Presque….presque…Presqu’île.
Ici, un bout de terre,
Basses terres,
Entourés de digues fragiles,
Lie les gens de la terre à la mer.
La mer,
Accessible à volonté, en illimité,
À la marée humaine
Peut importe qu’elle soit grande ou petite la marée…
Pourvu qu’elle vienne mouiller nos pieds
De vaguelettes montantes ou descendantes
Transparentes, parfois moussantes, si troublantes
La mer,
Apaisante et troublante.
Regardez…ce va et vient!
C’est l’éternité qui respire du bout de ses vagues ondulées…
Regardez! La mer.
Elle chevauche les traces des hommes remplis d’éphémérité.
Regardez, Respirez, Admirez…
Recommencez.
Et pour les plus aventuriers,
Laissez-vous entourer d’eau salée
Sur la petite île de l’Archipel
Elle se laisse apprivoiser pieds nus.
Le temps d’une marée…
Venez..
Pervenche
Océan,
espace de liberté,
remue-mémoire
qu’exerce à mon oreille,
le souffle du départ.
Océan,
mon chemin de ronde
c’est toujours
quand la mer est pleine
que mon cœur porte
haut et loin.
Ouessant
armure contre mes tempêtes,
sentinelle de mes solitudes,
mon haleine que je réapprends,
mes paupières neuves sur le lointain,
gifle à ma nouvelle personne.
Un vieil homme défiguré
d’avoir trop vécu à côté de sa vie,
d’avoir trop levé
les haltères de son âme
me dit :
« Vois-tu jeune homme,
ici on peut se regarder
se modifier, se reconstruire,
se dire qu’il est encore temps ».
A Ouessant
la baisse du jour
est une intuition.
Pas de cris mais…
des claquements d’ailes.
Les mouettes soupèsent
le clocher des prières,
quelque chose ou quelqu’un dans la regard.
Dès l’aube
à Ouessant
Dès l’aube
vent et grêle,
pluie à genoux
devant ses ombres.
Appauvri
par son peu de lumière
le matin s’estompe,
le jour se renie.
Il n’y a que la brume
dans le monologue de ses ruelles
qui peut rapprocher
l’île de son âme.
Mouettes aux portes closes du matin,
sur vos ailes chevauchantes
je lis les croyances insomniaques de l’île.
Dès que son silence m’immobilise,
je me rapproche de moi-même
comme un chat s’enneige de l’au-delà
et que le songe inspire.
Je me découvre quand les mots me font peur
quand Ouessant refuse le calice de la nuit
comme un enfant rumine ses premiers pas.
Là où l’océan sourit
à ses inséparables déferlantes,
je suis d’outre vie inhabitée.
Je m’oublie et me dis
que la mouette orpheline
triomphe du ciel
et de son unique saison.
Elle me répond
soulignant son vol
d’un baiser à la terre
« c’est le large
que je veux m’offrir ».
Jean-Albert Gueneguan
5 ) Demain, tout aura changé
Un ciel couleur d’oranger
Un ciel couleur d’oranger
Les îles en majuscule
Un ciel couleur d’oranger
Les îles en majuscule
La glaise blanche des grèves
Au printemps, le soleil cou-coupé
La course des courlis sous les roseaux
Au printemps, le soleil cou-coupé
La course des courlis sous les roseaux
La plage et ses prairies de sel
Les algues encre de Chine
Au printemps, le soleil cou-coupé
La course des courlis sous les roseaux
La plage et ses prairies de sel
Les algues encre de Chine
Où fleurissent les petits crabes et le polystyrène
Le sable en bouquet que la mer déshabille
Un ciel couleur d’oranger
Les îles en majuscule
La glaise blanche des grèves
Au printemps, le soleil cou-coupé
La course des courlis sous les roseaux
La plage et ses prairies de sel
Les algues encre de Chine
Où fleurissent les petits crabes et le polystyrène
Le sable en bouquet que la mer déshabille
Et la nuit met sa tête de porcelaine
Le sable en bouquet que la mer déshabille
Et la nuit met sa tête de porcelaine
Le sable en bouquet que la mer déshabille
Et la nuit met sa tête de porcelaine
Et convertit ses ombres
A la nouvelle marée
Un ciel couleur d’ardoise
Un ciel couleur d’ardoise
Achève mes certitudes
Un ciel couleur d’ardoise
Achève mes certitudes
Que demain tout aura changé
Un ciel couleur d’oranger
Les îles en majuscule
La glaise blanche des grèves
Au printemps, le soleil cou-coupé
La course des courlis sous les roseaux
La plage et ses prairies de sel
Les algues encre de Chine
Où fleurissent les petits crabes et le polystyrène
Le sable en bouquet que la mer déshabille
Et la nuit met sa tête de porcelaine
Et convertit ses ombres
A la nouvelle marée
Guy Prigent
4 ) Le vent, soleil rézéda
Les jours d’algues, à la criée des mouettes
Sur la lande des grèves
La violence mauve et la tendresse aussi
Le cresson bleu des marées qui mûrit entre les berniques des rochers tempêtes
Les doigts rouillés A toucher trop l’écume
Des visages de Noroît
Où viennent s’échouer les cernes violettes
Et les étoiles de sable froissées par le vent
L’esquif d’un regard tout bout dehors
Qui fait l’amour à un autre regard
Dans un ciel de n’importe quelle couleur
Par force 10 au moins
Escalader des talus de tendresse et de mimosa
Avec la maladresse de nos vingt cinq ans
Et décrire les îles frappées de ton nom
Les roses burinées à nos rêves en boutonnière de la vie domestique
La dérive des continences
des baisers bruyère des gestes simples
De l’homme qui a faim de rivages fougères
De soleil réséda
Et du chant de golo robin
Guy Prigent
3 ) La côte et l’île
La côte est belle du trop plein des saisons passées, des échafaudages de brume et de mouettes
Les coqs de bruyère grattent la grâce infinie des limons de terre
L’eau gronde dans les racines, salive des réglisses d’écume sous les ardoisières de corail
L’île célèbre des remembrements de marées fertiles et dédouble les veines du temps, du temps retrouvé, les jours d’algue, à la criée des mouettes…
Sur la lande des grèves
Le tumulus a un regard de pierre, trouée par le vent, ses doigts de schiste s’enfoncent dans la terre salée
des enfants s’échappent avec des sourires pareils aux oiseaux cachés dans leurs mains
Ils savent lire les paysages à l’envers, qui buissonnent entre le bunker, le grand rocher et le four pour faire de la soude
Les pêcheurs et les randonneurs mettent leurs rêves dans les pognes du vent et s’en vont parfois avec les merveilleux nuages mettre un peu de désordre dans leur tête fauve, en attendant la prochaine marée
Les légendes s’accordent avec l’eau vive et le ressac des mots
Nous ne sommes faits et défaits que de mots et d’un peu de silence autour…
Karn, comme une promesse, une illusion d’île, pour rendre les hommes plus fraternels
Guy Prigent
2) Je regarde la mort douce du soleil sur les épaves
Je regarde la mort douce du soleil sur les épaves
Attendre la tendresse du varech
Et le frisson des algues avec le jusant des vives eaux
Le remembrement du sable et du sel
Dans les coquillages des grèves
Les îles chargées de genêts d’oiseaux lichen
Et bientôt de la foule bruyère
Déposer l’écume de l’oublie jusqu’au port nu des rêves
Sourire à la femme en noir
Qui épouse les nuages du ciel
Humer l’impossible quand le vent vous inquiète
Et cicatrise vos rides, vos éphémères
Et surtout ne pas faire de projet avec la mer
Gréer sa solitude avec les voiles ivres de sa poitrine
Dérober ses étoiles à la nuit
Pour ne pas désespérer du sommeil
Ecarter le sexe pluriel de la folie nuptiale
Gouter la pierre de jasmin
Garder dans les yeux un pays gorgé de mousses et de gazelles
L’horizon captif sous l’herbe bleue des éponges
Un matin de bruine sous la cendre rouge
La brisure des lèvres
Et les syllabes jamais redites
La certitude que le jour est mort des ses propres blessures
Guy Prigent
Poésies sur l’estran
1 ) Les chemins de la mer
En mer, les mots déradent plus vite, roulent sur eux-mêmes dans le prisme de la vague, hantés par le souvenir de la lumière qui lie les mots au corps.
Alors les mots passent d’un visage à l’autre, s’usent au rythme des navigations océanes, changent de navire pour changer d’histoire… Nos rêves passent dans ses rêves…
La lumière parle à la lumière, croise d’autres parcours, ajuste l’estime du navigateur, le capitaine et ses rêves…
Je me rappelle la phrase de Melville : l’homme navigue à la circonférence de la mer, près de la terre ferme, mais ne rentre jamais dedans la mer, inclinant son étrave vers le môle, la cale ronde, évitant les saillants du rocher, l’éperon d’un quai, pour lui préférer la cale ronde, les bords de grève. Rester à la surface toujours, éviter les creux des rivages, sauf lorsqu’ils invitent aux escales, aux criques, en suivant la blancheur d’un amer, le pain de sucre blanchi à la chaux…
Le phare aux murs lisses, recouverts d’écaille, d’opaline, de céramique bleue, l’image inversée du ciel, le reflet tremblant de la mer…
Mais les murs sont souvent hachurés de cristaux de sel, effrités, ne laissant que des failles invisibles, où les ombres de la nuit se terrent…
Alors le ciel s’égoutte, s’empare de ces lignes de vie, croise avec le vent complice, pour faire danser la marée des villes…
Que dire d’une lumière qui n’est plus caressée, entretenue, habitée, à qui on ne parle plus ?
Que dire d’une île qui n’est plus abordée ?
Les chemins de la mer s’enlisent dans le ciel, dans une lumière sidérale réservée aux nouveaux phares satellites
La route des navires n’est plus qu’un point sur la surface de la terre, qu’une série de points lumineux qui ne regardent plus la mer.
Guy Prigent
Santorin
Villages percés et silencieux
tous les murs sont arrondis
Près des eaux bleues dans le volcan noir
de La Caldeira.
j’ai souhaité « Kalispéras »
aux femmes assises devant leur porte
Le soleil s’est présenté à la mer
les nuages ont tout englouti
Les îles sont des oiseaux qui frôlent la légèreté de l’eau
J’aurais pu ne pas dormir
dans l’atonie des mots
et seulement recueillir
l’éclatement des fruits
la jouissance muette
meurtrissure de volupté
La cassure du sang partagé
l’immense vague, les yeux fermés
dans tes bras parfumés
A l’heure où le ressac déferle
de toute sa violence rougeâtre
L’oubli de l’incertain
l e geste de la main
et l’évidence du jour
Annie Coll
Patmos
Donneras-tu
plus que ce que tu as ?
Pas encore
L’enfant saura-t-il
pourquoi il joue ?
Pas encore
Les cailloux blancs de la route
brilleront-ils au soleil du soir ?
Pas encore
Nos amours mauves
fermeront-ils la porte de la peur ?
Pas avant le retour des bateaux
Annie Coll
Icaria
Une barque de bois blanc
file vers le désert
nul remous
pas de sillage
Je marche dès que mes pieds sont nus
confondue au souffle
hors d’atteinte
L’engloutissement des soleils
conduisant au présent
donnera le chiffre réel du monde
La vérité quant à elle
ne tombera pas au fond du puits
elle a glissé
sur la margelle du temps
Annie Coll
Invitation à Belle-Isle
Viens, nous ouvrirons un lit
nous choisirons une plage blanche
pour écrire notre histoire
la page sera, bleue,
de nos premiers regards
nos initiales croisées seront la couverture
et chaufferont nos pieds
dans cette grande aventure
orphys et liserons
empourpreront nos lignes
et des boutons naîtront
de nos vertes coquilles
paroles douces, écumes,
sur les lèvres des dunes
Viens, nous plisserons les draps
les marquerons aux chairs
nous ne serons jamais
des amants de passage
nous garderons sur nous
comme des enfants sages
un porte-plume éclair
pour toujours dessiner
sur le dos de la mer
quand les vagues moutonnent
et couvrent les bruyères
de grandes îles claires
Viens, marin éphémère
Viens me lire et te taire
Viens ancrer le possible
et croire en une terre
Viens doubler haut, très haut,
le phare du livre ouvert
Viens mêler tes eaux vives
à mon encre hauturière.
Michèle PETTAZZONI
Rêve d’îles
Ton vieil atlas et ta boussole
T’ont permis d’explorer le Nord.
Ce matin,
Puisqu’il pleut dehors,
Vers le Sud,
Ton rêve s’envole.
Il s’élance vers les pudiques
Terres de l’Océan Indien,
Où l’eau et le vent musiciens
Caressent le feu des Tropiques.
Les zébus rosis de poussière
Emportent ton rêve au galop.
Egaré sur les hauts-plateaux,
Tu voudrais percer le mystère:
«Où donc es-tu
Forme inconnue,
Ile dormant dans un lagon,
Barque dansant près d’un ponton,
Par un fin sisal
Retenue?»
Ton rêve glisse et plonge, et plane
Entre Maurice et Rodriguez.
Il repart de Diego-Suarez,
Pour revenir à Antsirane.
Ton rêve fou fuit le jour morne,
Le brouillard sourd, la pluie, l’hiver,
Le rocher gris, le vent qui corne
Dans les lichens et la bruyère.
Ton rêve parle de savane,
De vanille et de poivre vert,
De hauts bambous et de rabane,
De corail noir,
De sable clair…
Ton rêve d’enfance lointaine
Te mène jusqu’à Zanzibar
Et longuement
Tisse une chaîne
Tout autour de Madagascar.
Yonne Le Meur-Rollet, dans le recueil » Saisons de pluies ».
(première parution de 1999 épuisée, recueil réédité en juillet 2022)
ARCHIPEL
Refuge de matelots et chevlinouères,
Braves et robustes Jaguens,
Pêcheries de mes grands mères,
Oasis à l’envers,
Chagrin.
Estran ,grève et marins herbages,
Les bigorneaux en boutons fleurissent,
Traitres récifs et roches sauvages,
Le bateau fait naufrage ,
Clarisse.
Mouettes sternes et Colombière
Les huitriers sur les bouchots
Les vagues et le vent en colère
Blanchissent les pierres ,
Sanglots.
Les Gaulois ne sont plus en garde,
Un œil sur les Couillets
La tour Vauban regarde
L’Indien en embuscade,
Regrets .
Charmeuses les Ebihens appellent,
Capture et prise d’otage
Au petit port de la Chapelle,
Attaches éternelles,
héritage.
Grande et Petite Roches font le guet.
Sur le Petit Anon, postée en sentinelle,
La balise veille au Chevet
Des ilots en chapelet
ARCHIPEL.
Louise MONTAGNE
Juin-juillet 2022
LIBERTALIA
Loin des hommes
Loin des terres
Caressées par les ondes
Par la houle du temps
Les îles hors d’eau
Masquées par la brume
Dressent leurs tours de granit
Au firmament
Elancées, enracinées,
Elles sont là, parfaitement ancrées
Et pourtant des marins avertis disent
Les avoir vues danser
La gigue, la polka,
Les avoir vues s’animer,
Se répandre en folles arabesques
Se confondre en verts conciliabules
Se renvoyer des marsouins
Et puis d’un coup se taire, à l’approche d’un esquif,
Ou du son syncopé d’un navire égaré
Je m’imagine dérivant en mantel d’algues
Décoré d’anatifes, de balanes, de coraux,
Découvrant pour la première fois
Leurs ballets, leurs secrets…
Le récit d’un naufrage,
Et comment s’abîma un vieux thonier
Sur ces récifs, ces écueils égarés,
Et comment ces mêmes roches perdues
Recueillirent en leur sein, sur leurs plages, sous leur aile,
Les malheureux qui sans elles auraient péri,
Qui sans l’aide des îles salvatrices
N’auraient pas survécu,
N’auraient pas fondé cette république oubliée, inédite,
Cette impensable lubie, cette belle utopie :
LIBERTALIA
Je garderai longtemps le souvenir ému
De ces îles-sœurs des hommes dans leur destin,
Arche des naufragés, chapelle des marins
Archipel de nos rêves au petit matin.
Jean-Bernard Vivet
Saint-Suliac, 28 novembre 2021