Le ressac des mots

Au son de la plume qui crisse
Les mots se posent sur le papier
D’ombre et de lumière nimbés
Ils nous racontent la vie d’Ulysse

De Proserpine, Agamemnon, Clytemnestre,
Conjurant leur sort en portant haut leur parole
Ou se bouchant les oreilles pour ne pas entendre
L’appel des sirènes qui affole

Les mots s’agitent, rampent sans bruit sur le support
Blanc,
Et soudain déclament notre histoire
Dans le ciel,
Bleu.
Ce cri d’azur par quatre fois déclamé
Ce cri du cœur qu’aucune camisole ne contient
Embrase l’épaisseur ouatée de l’air et s’envole

Ainsi, les rives du temps intime ne comptent-elles aucune limite
Seul subsiste le trait fulgurant déchirant les nues

On entend la rumeur qui monte, enfle,
L’appel puissant à la justice d’un ‘ j’accuse ’
Le parfum de scandale ahané dans la rue
Par les vendeurs de journaux,
Journaux qui finiront repliés
En cornet pour accueillir le sifflement
Des marrons chauds, tout juste grillés

Mais qu’on y prenne garde, les mots sont des bombes
Qui pulvérisent les terrasses et remplissent les tombes
Gardons-nous de les mépriser, ils reviennent à l’assaut
Ils reviennent en trombe, nous font faire le grand saut

Depuis le cri de notre naissance jusqu’à notre dernier souffle
Tous ne sont pas écrits, perdus dans la mémoire de l’eau.
Mais ils circulent encore dans les méandres du cerveau
Têtus, subtils, crus, déchirants, sagaces
Et du ressac des vagues de mots inconscients
Nous recueillons l’écume silencieuse du dire innocent.

Jean-Bernard Vivet, Saint-Suliac, 19-01/2024

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