Venez offrir en partage vos poèmes et les poèmes des auteurs que vous aimez sur le thème « volets clos ».
La billetterie du Festival 2024 est ouverte !
Festival en poésie "LA HOULE DES MOTS : EXIL, EX-ILE , Je ne suis pas d'ici, je ne suis plus d'ailleurs". 25,26,27,28 juillet 2024 à Saint-Jacut-de-la-Mer.-
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Les volets clos.
Fin de journée.
L’homme s’est assis sur son siège préféré
Sur l’accoudoir, le courrier du jour récupéré
La cigarette allumée.
Comme tous les soirs son regard va errer
De l’une à l’autre des fenêtres
D’en face, cherchant à percer le mystère
Des êtres qui s’agitent à portée
Mazette ! Ce soir les volets sont clos.
Ceux de Madame Louise et de son jumeau.
Hier, ils s’activaient préparant des cadeaux.
Aura-t-elle fini le gâteau qu’elle destine à ses petiots ?
« – Trop gâtés les sales marmots ! »
Volet clos chez Arthur, le punk musicien
Toujours torse nu, les cheveux sur les yeux
La guitare à la main
L’air conquérant et joyeux.
« – De quoi qu’il mange, l’maudit morveux ? »
Volet clos chez la belle du troisième.
Jeune femme élancée, bien balancée.
On n’est pourtant pas jeudi
Le jour ou après minuit
Un amoureux déguerpi en catimini.
«- Pourquoi pas le lundi, le vendredi ou le samedi ? »
Cela lui ferait presque envie…
Nerveusement il se saisit de l’enveloppe délaissée qu’il ouvre
Et voici ce qu’il découvre :
« C’est moche. T’es moche
Pauvre James Steward, ferme tes yeux
Tu ne nous reverras pas de sitôt
Fenêtre sur cour, c’est fini
Aujourd’hui les volets sont clos. »
Catherine Coppalle
VOLÉE ENAMOURÉE
La voix tantôt aimée, au bout du répondeur,
Surgie du passé, dans toute sa candeur,
Et voilà le monde qui soudain chavire
Les souvenirs fous de celle qu’on admire
Se pressant aux portes des pensées
Au portillon de mon imagination
Réveillant tous mes rêves insensés
Dans la tête en proie aux tourments ce cri indicible :
La revoir, l’apercevoir seulement même,
Et murmurer ne serait qu’en moi-même un unique je t’aime
Savoir quelle est sa vie, comment se porte-t-elle, à quoi songe-t-elle
Depuis toutes ces longues années écoulées sans nouvelles ?
Faire le guet dans la nuit noire
Dans la pénombre du grand chêne,
Où l’on se donnait rendez-vous,
Juste devant la maison aux persiennes
Aujourd’hui closes, belle et bien fermées
Habite-t-elle toujours cette ville aux reflets dorés
Qui, dans sa lumière douce, blanche,
Va du jaune coquille d’œuf au gris perle ?
L’attente, patiente, se fait baume
Aux blessures, aux douleurs endurées.
Minuit vient à sonner, elle n’est pas rentrée,
Peu m’importe, j’attendrai, reviendrai, guetterai
Mille fois s’il le faut, en transe, transi, apeuré,
Mais vivant, mille fois vivant dans la joie de l’émotion retrouvée
Aurais-je manqué son retour, est-elle alitée,
A-t-elle changé d’existence, de résidence, de boulot ?
Comment savoir ? Jeter quelques menus cailloux aux volets clos
Comme aux premiers temps de nos primes amours
Défi aux remontrances de l’autorité parentale
Au temps où s’aimait tendrement pouvait encore faire scandale
J’ose enfin, rassemble à l’aveuglette
Quelques petites pierres qui crissent sous mes doigts
Et me lance avec elles, franchit l’espace, vole jusques aux volets
Dans ce lancé du semeur plein d’espoir,
De confiance dans les graines qu’il a semées
Et qui vont germer, grandir, s’épanouir
Je heurte le bois du volet qui émet un son mat,
Retombe au pied de la façade, m’éparpille en petits cris aigus sur le goudron
Seul le silence répond à cette volée de cailloutis, avoinée à mon cœur embrasé
Qu’importe : demain je reviendrai.
Jean-Bernard Vivet Saint-Suliac, 18 octobre 2023
LA MAISON DU CORSAIRE
Barrée d’une vilaine lézarde
Arborée comme une blessure de guerre
Sa façade blafarde
Figure le portrait d’un corsaire.
Les volets sont fermés,
Le ciel pleure sur les joues de pierre,
Larmoie sur les yeux baissés
En ruisselant sur leur mystère…….
Perchée sur la falaise
La lugubre bâtissem’interpelle,
Me met mal à l’aise,
Et si c’était l’hotel
De marins téméraires
S’abreuvant de naufrage,
De sinistres corsaires………
Mon esprit voyage………….
La grande maison est en pause
Tutrice des secrets de rivages
Gardienne aussi des récits d’abordages
Sous ses étranges paupières closes.
Les rires des flibustiers ,
Les palabres des timoniers,
Se sont tus.
Les plaintes des gabiers,
Les ribotes des cambusiers
Ne sont plus……….
Les secrets de flotille
Dans le tombeau sommeillent,
Mais peut être qu’un soir
Revenant d’autres monde
A l’abri des regards
S’animeront dans la tombe.
Louise Montagne octobre 2023
Derrière mes volets
( Poème lu par Dominique Mongodin)
Me réveiller très tard un matin de septembre
En retenant captifs des rêves indolents
Qui, tels des papillons égarés dans la chambre,
Palpitent, prisonniers des rideaux transparents,
Me laisser longuement aller à la paresse
Sur un lit encombré de coussins désuets,
Dévorer des romans, partager la détresse
D’une héroïne en pleurs que rongent les regrets,
.
Ecouter un pianiste aux mains tristes et lentes
Sur un clavier tragique où meurent les saisons,
Tandis que de sa voix aux notes déchirantes
La Callas fait rimer amour et trahisons.
Je vis tous ces instants, à l’abri des tourmentes
Derrière les vieux murs de ma grande maison,
Quand mes volets sont clos et qu’à travers les fentes
Des éclats de soleil se glissent sur mon front.
D’aucuns pourraient penser que c’est l’indifférence
Qui m’empêche d’ouvrir les yeux sur l’extérieur.
Mais je m’enferme ainsi, dans l’ombre et le silence,
Lorsque j’entends tonner les fracas de mon cœur.
Yvonne Le Meur-Rollet. Octobre 2023
Après la chute
(Poème lu par Michèle Pettazzoni)
Le lierre se glisse
entre les lames disjointes
des lourds volets qu’on n’ouvre plus.
On ne voit plus la silhouette familièe,
de la pensive jardinière,
tête grise coiffée d’un grand chapeau de paille,
penchée sur ses rosiers
Une nuit d’alarme,
de douleurs et de larmes
on l’a transportée ailleurs, pour la sauver.
On lui a fait comprendre
qu’elle ne peut plus rester
dans sa maison trop grande et pleine de dangers.
Elle n’a pas protesté.
Dans le silence du chagrin, elle a tout accepté.
Le lierre a résisté
et continue à se glisser
entre les lames disjointes
des lourds volets de bois qu’elle n’ouvrira plus.
Yvonne Le Meur-Rollet. Octobre 2023
ROAD MOVIE
Fini l’été, les rues désertes, partout des volets clos
Dans la ville fantôme le vent impétueux s’engouffre
Le sable vole fin et léger
Surgit au milieu de la rue un trio débridé
Deux garçons encadrent une fille
Le petit fluet, nerveux
Le grand traîne une jambe, sur son pantalon une tâche sombre
La fille en mouvement, libre de son corps
Sa robe rouge très courte
Les garçons parlent trop vite, trop fort
La fille rit aux éclats
Les voix résonnent dans le vide
Soudain un volet tape, le bruit sec fait sursauter
Une main vite portée sur l’arme de poing
Silence. Rassurés, ils chantent à tue-tête
« On n’est pas bien là » ? répète le grand
Valse improvisée dans ce décor qui leur appartient
Trouver enfin une place au milieu de nulle part
Mais comment tuer le temps ?
Question prémonitoire d’une cavale picaresque
Françoise Sartorio
VOLETS MI CLOS
Les mains de ma mère tirent fermement les volets
J’enrage contre cet isolement forcé
Dormir en pleine journée!
Je tente de négocier, pas le noir complet
Ma mère entrouve les volets désormais mi-clos
La fente de lumière me relie à la vie
je devine la chaleur du soleil
Le vent bruisse dans le figuier
libérant toute sa fragrance
La lumière tombe puis rejaillit, le soleil a gagné
Je distingue le matou
Il se prélasse sur le rebord de la fenêtre
Il me nargue, en liberté et moi en cage
La poussière de lumière entre dans la chambre
Mes yeux s’écarquillent de toutes leurs forces
Rester éveillé en fixant un point lumineux
Résister tant bien que mal à la torpeur
Soudain une main fraîche caresse mon front
Un doux baiser et une odeur de lilas
Debout tu as assez dormi
Françoise Sartorio
Dans la lumière matinale
Je veux rester, matins,
À trainer dans le lit
Douillettement niché
Entre satin des draps
Et la soie de ta peau.
Et ne sentir sur moi
Que tes mains explorer
Chaudes inquisitrices,
Sur mon corps dénudé.
Et ta bouche endormie
Me caresser d’un souffle
Une épaule et le dos.
Je sens que tu t’étires
Sans vouloir te lever
Avant le jour qui naît.
Comme nous dans le ciel
Les couleurs paressent.
Tu te loves d’amour
Contre moi qui t’accueille.
Tu t’étreins dans mes bras
Et plonges à nouveau
Dans un sommeil léger.
Si léger qu’un seul geste,
Juste un doigt qui frémit
Et tu expires un
Gémissement lascif.
Il n’y a plus de temps
Il n’y a que l’espace
Dans ses cent dimensions.
Et les premiers rayons
Du timide soleil
Traversent le volet,
T’éclairent obscurément
Et m’offrent de te voir.
Lassitude
Je me suis si souvent forcée
à poser mes mains
sur vos ferrures …
Froides mes mains
sur vos parois
de métal
rouges mes paumes retournées
pour cacher
toujours cacher
le sang
la limaille
les traces …
Je me suis si souvent
forcée
à chercher des serrures
à la porte de vos faces …
Le temps a rouillé
les volets
les gonds, comme avachis,
se tassent …
Toutes les clefs
que j’avais amassées
je les ai jetées
à la volée
envolées
à la casse …
J’ai perdu le goût du secret
et la connaissance me lasse.
Michèle PETTAZZONI
La maison de vacances
Elle est là, droite et fière,
de l’ombre à la lumière
avec ses hauts murs blancs
et ses roses trémières
Un chaud soleil l’éveille
aux parfums de l’été,
la vague au loin faseye
sans jamais la blesser
Son volet bleu plastronne,
gardien de mes secrets
ma mémoire y braconne
souvenirs et regrets.
Michèle Pettazzoni